L'association "Le Haut-Fer" de Mandray vous propose de découvrir |
Les hauts-fers vosgiens
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La petite industrie hydraulique de la montagne vosgienne se compose de moulins à céréales, chaque village en comptait au moins un, de scieries, de petits ateliers de transformation du bois (saboterie, tournerie, boissellerie, fabrication de boites à fromage, menuiserie) complétés à partir du 19e siècle par les graniteries, féculeries et les petits ateliers textiles (filatures et tissages).
Dans cet ensemble, les scieries occupent une place prépondérante, justifiée à la fois par l’importance de cette industrie dans la région fortement forestière et par la bonne conservation de ces édifices. Contrairement aux moulins situés au cœur des hameaux et aujourd’hui quasiment tous disparus, les scieries ont mieux résisté à la pression immobilière en raison de leur localisation en périphérie des bourgs, à proximité de la forêt et le long d’un cours d’eau trop petit pour nécessiter le renouvellement de son exploitation au cours du 20e siècle.
Du moulin à scier au haut-fer
Le « moulin à scier » terme généralement employé dans les archives médiévales est une machine à lame verticale animée d’un mouvement alternatif (connue dans la littérature sous le nom de scie à cadre) basée sur la technique du sciage de long et entrainée par une roue hydraulique. Elle est connue dans ses principes depuis le Haut Moyen-Age et sa construction est attestée dans toute l’Europe et bien étudiée autour de l’arc Alpin.
Villard de Honnecourt en donne les principes dans un dessin vers 1230. Ce plan schématique, même s’il reste difficile à interpréter montre les principes à mettre en œuvre : transformer le mouvement de rotation de la roue en mouvement de translation alternatif de la lame, guider la pièce de bois à scier et la faire avancer dans un mouvement lié à celui de la lame. Ces trois principes, mis en œuvre par des solutions technologiques diverses dans l’espace et le temps, resteront intangibles jusqu’au début du 20e siècle où la scie à ruban finira par les détrôner.
Léonard de Vinci en donne vers 1480 un dessin surprenant : la lame guidée par un cadre est entrainée par l’intermédiaire d’un système bielle manivelle par une roue hydraulique par le dessous, le mouvement du chariot est synchronisé à celui de lame par une perche et une roue à rochet. Or cette évolution de la scie à cadre caractérisée par l’emploi du système bielle-manivelle ne trouve sa première attestation, du moins dans les Vosges, qu’en 1836 et ne sera généralisé qu’à la fin du 19e siècle donnant naissance à l’appellation « haut-fer » ou « scie à manivelle » pour ce type de scie.
Auparavant, les sources font référence à des « scies à bloc », plus localement appelées « scies à plomb », caractérisées par l’emploi d’un arbre à excentrique pour transmettre le mouvement de la roue au cadre qui porte la lame. Ce dernier est propulsé vers le haut par le choc de l’excentrique sur le cadre, qui en retombant de toute sa masse, scie.
Les archives montrent que toutes les scieries domaniales de la vallée de la Plaine sont dites « à plomb ou à came» lors de l’inventaire de 1852 et que lors de celui de 1912 elles sont toutes dotées au minimum d’un haut-fer, voire d’une seconde scie. L'appellation "haut-fer" semble strictement vosgienne et n'apparait dans les textes qu'au début du 20e siècle. Dès 1860, la transformation systématique commence, elle nécessite souvent la reconstruction totale de l’édifice. De plus, elle est généralement accompagnée, pour les scieries situées sur de petits cours d’eau par le remplacement de la roue hydraulique par une turbine. Cette dernière modification entraine le creusement d’un étang de retenue d’eau, l’installation d’une conduite forcée et donc le réaménagement des biefs.
Les machines conservées sur le territoire de l’étude forme un ensemble homogène du point de vue du mécanisme de la scie : scie à manivelle avec un chariot guidé par des roues et entrainé par friction par un rouleau, fixation de la grume sur le chariot par griffes ou pinces. Ceci les distingue fortement des scieries de l’Europe alpine étudiées par Herbert Jütteman dans « Alte Bauernsägen » qui reconnait des scieries de type augsbourgeois (type A dont l’épicentre serait la ville d’Augsburg en Allemagne) au nord de l’arc alpin et de type vénitien (type B) au sud. Scieries dont le type chariot et son entrainement sont fort différents des scieries vosgiennes qui nous sont parvenues. L’absence d’une étude générale des scieries sur l’ensemble du territoire français et la pauvreté des plans de scie à bloc, précis et localisés, ne nous permettent pas de rattacher formellement les scieries vosgiennes et plus généralement celles du nord-est de l’Europe au type A, même si les techniques de construction de quelques scieries belges de la région de Virton (scierie Naisse à Virton et moulin Clément à Saint-Léger) semblent s’en rapprocher. On peut donc imaginer que c'est une technologie spécifique et purement locale qui a été développée au cours du 19e siècle pour rénover l'ensemble des scieries de la montagne vosgienne.
L'évolution des hauts-fers
Les hauts-fers vosgiens, bien que construits sur un sous-sol maçonné, sont essentiellement constitués de bois, tant pour le bâtiment, la scie ou la roue hydraulique. Les axes de transmission ou de guidage sont les seules parties qui deviennent métalliques au cours de leurs transformations. Le sapin, résineux le plus accessible localement, en constitue la majeure partie ; le chêne y est utilisé parcimonieusement. En fonction de leur usage et de la proximité avec l’eau, certains organes sont remplacés régulièrement. La durée de vie maximale d’une roue hydraulique, l’un des organes les plus fragiles, est estimée à 15 ans. La nécessité de garder un outil performant induit donc une reconstruction régulière.
L’avènement des scieries industrielles
Dès la fin du 20e siècle, la motorisation des scieries évolue, le moteur hydraulique est économique mais trop aléatoire : pris par la glace en hiver et souffrant de manque d’eau en période d’étiage. Les scieries s’équipent souvent d’une seconde source d’énergie, tout d’abord la vapeur, puis les moteurs thermiques et enfin les moteurs électriques. Les machines aussi évoluent, des déligneuses circulaires destinées à éliminer les bords bruts des planches, des « rouleaux dédoubleurs » destinés à refendre les grumes équarries prennent place à côté du haut-fer. Ils sont encore de fabrication locale et insérés dans un châssis en bois. Au début du 20e siècle apparaissent les scies alternatives multiples de construction industrielle, elles prennent encore place à côté du haut-fer et n’en sont qu’une version industrielle dans un châssis en fonte à plusieurs lames.
Les scieries de la montagne vosgienne recensées
Retrouvez-les toutes avec leurs machines sur le site de l'Inventaire général - Région Grand Est: |
Premier dessin d’une scie hydraulique, carnet de Villard de Honnecourt vers 1230. Dessin d’une scie hydraulique. Partie d’un dessin à la plume de Léonard de Vinci vers 1480. © Bibliothèque Ambosienne de Milan ©Région Lorraine-Inventaire général. Cartographie de la typologie des scieries d’Europe centrale d’après Herbert Jüttemann.© Région Lorraine-Inventaire général. Dessin d'une scie à bloc d'après Bellidor, 1782. © Région Lorraine-Inventaire général. Scie multilame, scierie de Tavongoutte aux Rouges-Eaux (88). © Région Lorraine-Inventaire général. Moteur thermique Ruston & Hornsby, scierie de la Forge à Etival (88). © Région Lorraine-Inventaire général. Turbine hydraulique de type Canson, scierie du Lançoir, Ban-sur-Meurthe-Clefcy (88). © Région Lorraine-Inventaire général. |
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